A la maternité de Blaye, à la différence de celle du réalisateur Etienne Chatiliez, on ne trouve ni de Groseille ni de Lequesnoy. Juste deux mamans ordinaires dont on a échangé les bébés. Sur les quatre accouchements qui ont eu lieu en ce soir de juin 1991, deux petites filles ont vu le jour. Après avoir été immédiatement remises à leurs mères respectives, elles ont été conduites à la nursery, l’une d’elles parée d’un petit bracelet identifiant. Lorsque le lendemain matin vers 6 heures elles sont rendues aux mamans, l’une d’elles constate que son nourrisson est bien moins lourd que la veille. On lui répond que « c’est normal, les bébés maigrissent ».
Trois jours après leur départ de la maternité, l’une des accouchées, prise de doute, y retourne. Elle demande à ce qu’une prise de sang soit effectuée sur son enfant. Celle-ci révèle que le groupe sanguin du bébé est O+ alors que celui de la fillette qu’elle a mise au monde est AB+. On lui répond qu’il y a « parfois interférence avec le sang de la mère et les impuretés à la naissance ». La mère n’y croit pas et demande à ce que l’immunisation de son enfant contre la toxoplasmose, qu’elle a elle-même subie et lui a transmise, soit vérifiée. On n’en trouve pas trace. Le médecin de la maternité fait alors réaliser le groupage sanguin du deuxième bébé qui, lui, se révèle AB+ et immunisé contre la toxoplasmose … Les deux bébés peuvent enfin regagner leurs foyers respectifs.
Si la substitution accidentelle ne constitue pas une infraction pénale, l’enquête de la gendarmerie a toutefois permis d’établir que la fillette qui portait le bracelet identifiant l’a perdu pendant la nuit et qu’il a été replacé de façon hasardeuse par une aide-soignante. Or, la pose d’un bracelet par enfant est obligatoire dès la naissance et l’aide-soignante aurait du aviser immédiatement la sage-femme de l’incident. Ces deux fautes professionnelles ont fait l’objet d’une procédure disciplinaire et de nouvelles instructions : désormais, à l’hôpital de Blaye, les nouveau-nés portent deux bracelets, un au poignet, l’autre à la cheville.
Source : Sud-Ouest du 15/06/1991.
Photo : Carte postale ancienne représentant l’hôpital de Blaye dans les années 50. Réhabilité, il a été rebaptisé « Centre hospitalier de la Haute-Gironde » en 2011.